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C’est sous ce titre que paraissent les souvenirs de la grande Teresa Berganza, mis en forme par Olivier Bellamy, producteur à Radio Classique. Cet ouvrage est publié, cette semaine, chez Buchet-Chastel.

Nous sommes nombreux à admirer, depuis plus d’un demi-siècle, la cantatrice espagnole qui, avec Mozart, Rossini, Bizet, Manuel de Falla et bien d’autres encore, n’a cessé de nous combler. Aussi bien sur les grandes scènes d’opéra qu’au disque, depuis ses premières apparitions au Festival d’Aix-en-Provence, en 1957, elle nous a toujours enthousiasmés. Nous l’avons applaudi, à l’opéra Garnier, dans la production historique des noces de Figaro, dans la mise en scène de Giorgio Strehler. Et nous nous souvenons, en particulier, du concert donné à l’Arsenal de Metz, le 13 octobre 1994, au cours duquel la chanteuse se produisait en duo avec celle qui n’était encore que sa jeune élève, Maria Bayo. La veille, lors d’une rencontre présidée par André Tubeuf à la Fnac, Teresa s’était entretenue, en toute simplicité, avec ses admirateurs et nous avions eu, personnellement, le privilège d’échanger quelques propos avec elle sur ses premiers enregistrements de Zarzuela, sous la direction d’Ataulfo Argenta, disparu accidentellement, à l’âge de 45 ans, en 1958.

Dans ces quelque 200 pages, Teresa Berganza se livre avec une rare liberté de ton comme, seule, une authentique madrilène peut oser le faire. Elle évoque une enfance très heureuse, bien que, politiquement et moralement corsetée, dans l’Espagne franquiste, au lendemain de la Guerre civile. Les pages qu’elle consacre à la mémoire de son père, cet homme de grande culture qui lui donna l’amour de la musique, sont particulièrement émouvantes. Elle n’a pas de mots assez forts pour évoquer le séjour de celui-ci en prison, pour cause d’opinions républicaines et de dissidence politique. Les années de formation, la tentation d’entrer dans les Ordres, les premiers concerts avec des musiciens aussi exceptionnels que le chef d’orchestre Argenta, sont évoqués avec tact et précision, de même que les premières incarnations de Dorabella, dans Così fan tutte, au Festival Aix-en-Provence, aux côtés de Teresa Stich Randall et sous la direction du chef Hans Rosbaud. Un chapitre entier est consacré à Maria Callas aux côtés de laquelle Teresa apparut dans la Médée de Cherubini, à Dallas. Les portraits des chefs d’orchestre avec lesquels travailla la cantatrice sont particulièrement hauts en couleurs : la complicité de longue date avec Claudio Abbado, le comportement très aristocratique et « grand seigneur » de Carlo Maria Giulini, les relations complexes avec Herbert von Karajan, en dépit d’une admiration réciproque ; la collaboration tardive, dans l’enregistrement des Noces de Figaro, avec le vétéran Otto Klemperer qui tombe amoureux de son Cherubino qu’il prenait pour une nouvelle incarnation d’Élisabeth Schumann ; toujours dans les Noces de Figaro, les conseils de Sir Georg Solti pour l’air du premier acte « Non si piu », avec une comparaison sur la rythmique à adopter que la décence nous interdit de reproduire ici !

Les metteurs en scène actuels, du moins la plupart d’entre eux, sont la bête noire de Teresa Berganza et nous la comprenons volontiers, à tel point que nous renvoyons nos amis internautes à ces citations que nous avons spécialement mises en ligne et auxquelles ils accéderont en cliquant ici.

Sur un plan très personnel, la grande mezzo espagnole ne fait pas l’impasse sur les difficultés de sa vie privée, après un premier mariage avec le pianiste Félix Lavilla.

Enfin, une chronologie très complète et une discographie exhaustive, qui a le mérite de ne pas faire l’impasse sur les premiers enregistrements de Zarzuelas réalisés dans les années 50 en Espagne, sont insérées à la fin de l’ouvrage

Au total, un livre particulièrement attachant, que l’on dévore en moins de trois heures.

Merci, Madame, pour ses propos d’une haute élévation artistique, spirituelle et morale. Au terme de ces quelque 200 pages, nous vous admirons et vous aimons encore plus.

Jean-Pierre Pister