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 Amour à la française

 

La sortie d’un récital de Juan Diego Flórez -le précédent remonte à quatre ans-, suscite toujours l’attention de la critique et l’attente gourmande du mélomane. Publié par Decca le 3 mars dernier, ce nouvel enregistrement propose un programme assez accrocheur, à l’instar du portrait de l’artiste ornant la pochette, d’un style très latin lover. Le titre Amour, en français dans le texte, lorgne sans vergogne du côté des hit-parades de musique de variété.Mais son contenu présente de bonnes surprises.juan diego florez l amour

D’abord, sur le plan musical, on ne boudera pas son plaisir en retrouvant ces airs qui faisaient partie du répertoire de tout ténor léger ou de demi-caractère, il y a plus d’un demi-siècle. Extraits d’opéras-comiques français, ils sont scandaleusement oubliés aujourd’hui par le pays qui les a vu naître : La Dame blanche d’Adrien Boïeldieu ; Le Postillon de Lonjumeau d’Adolphe Adam ; La Jolie Fille de Perth de Georges Bizet ; Mignon d’Ambroise Thomas. D’autres sont plus connus : La Belle Hélène de Jacques Offenbach ; Lakmé de Léo Delibes ; Roméo et Juliette de Charles Gounod ; Werther de Massenet. Une rareté : l’air de Iopas, poète à la cour de Didon dans Les Troyens d’Hector Berlioz. Ces pages de musique, fort bien écrites et destinées à mettre en valeur la voix du soliste, offrent l’occasion de savourer les charmes d’un timbre tour à tour charmeur et éclatant, une virtuosité toujours réjouissante, même si le suraigu se fait parfois strident. On ne fera pas la fine bouche, par les temps qui courent, devant ce bonheur purement sensuel qui s’offre sans façons. D’autant plus, et c’est la seconde bonne surprise, qu’il est rare d’entendre l’opéra français chanté avec le style adéquat et une diction presque irréprochable (les « R » trahissent parfois un peu leur origine hispanique). Il y a un là une maîtrise phonétique qui faisait parfois défaut à Juan Diego Flórez dans ses prestations scéniques. On aurait aimé avoir le nom du répétiteur.

Le plus grand intérêt réside sans doute dans les choix de l’interprète qui semble vouloir marquer une étape dans sa carrière, celle où le ténor di grazia va s’effacer devant le ténor lyrique léger, voire lyrique, Werther ayant peu à voir avec le fringuant Postillon. L’essai est-il transformé ? Oui, si l’on s’en tient à la qualité du chant. Ce qui est tout sauf négligeable. Reste l’incarnation du personnage. Il ne faut pas faire de comparaisons hasardeuses et on ne reprochera pas à Flórez de ne pas atteindre l’intensité émotionnelle d’un Jonas Kaufman dans le lied d’Ossian, par exemple. Les spécificités vocales, comme les écoles de chant, distinguent les deux chanteurs. Ils ont en partage, cependant, l’intelligence et le respect du répertoire qu’ils abordent. Il n’est pas indifférent de constater que l’opéra français peut réconcilier deux traditions lyriques qu’on oppose parfois. C’est tout à l’honneur du génie de nos compositeurs d’être capables d’inciter de prestigieux interprètes étrangers à mettre toute leur science musicale au service du répertoire français.

L’Orchestre et le chœur du Teatro Comunale di Bologna, sous la direction de Roberto Abbado, le neveu du grand et regretté Claudio Abbado, accompagnent avec efficacité le soliste, même si le chef confond parfois vivacité et précipitation. Ne repoussez pas cet Amour : ni la beauté de ces pages ni le charme de l’interprète ne trahiront les promesses qu’un tel titre renferme.

 

Danielle Pister

Maria Callas « remasterisée ».

Maria Callas fut, sans aucun doute, la cantatrice la plus connue et la plus populaire de la seconde moitié du XXme siècle. Sa carrière fut pourtant d’une courte durée, s’écoulant sur à peine deux décennies, des années 1940 au milieu des années 60. Après avoir gravé quelque 78 tours pour le label italien Cetra, elle enregistra exclusivement pour EMI, essentiellement à la Scala de Milan, à Londres et, dans les dernières années, à Paris. Elle eut comme producteurs des personnalités aussi considérables que l’Anglais Walter Legge, mari d’Elisabeth Schwarzkopf, et le Français Michel Glotz. Elle travailla avec une poignée de grands chefs d’orchestre de son temps, en particulier l’italien Tullio Serafin qui fut son mentor, plus rarement Herbert von Karajan et, dans les dernières années, Georges Prêtre. Parmi ses partenaires, à la scène comme au disque, on peut noter les noms de Fedora Barbieri, Giulietta Simionato, Giuseppe di Stefano, Tito Gobbi, Franco Corelli, Nicolaï Gedda, plus exceptionnellement Christa Ludwig et Carlo Bergonzi. À cette discographie « officielle », s’ajoute un nombre important d’enregistrements « sur le vif », abondamment réédités depuis son décès survenu le 16 septembre 1977 à Paris. Ces « live », passionnants sur le plan artistique, mais présentés le plus souvent dans de mauvaises conditions techniques, n’entrent pas, ici, dans notre propos.

Depuis l’avènement du CD, plusieurs rééditions ont été réalisées par EMI, en particulier en 1997, pour le 20eanniversaire de sa disparition et 10 ans plus tard pour le 30e anniversaire. A cette occasion, était mis sur le marché un imposant coffret de 70 CD comportant l’ensemble du legs de la cantatrice, opéras intégraux et récitals. Mais ces reports numériques impliquaient un système de filtrage qui gommait certaines harmoniques et compromettait le parfait rendu sonore des voix aussi bien que de l’accompagnement orchestral. L’année dernière, suite à des difficultés financières largement commentées par la presse et dans le contexte global de la crise du disque, le groupe anglais EMI a été racheté par l’américain Warner. Celui-ci a eu le souci de reprendre de A à Z les processus de masterisation en partant, le plus souvent possible, des bandes originales et en évitant toute éradication des harmoniques aigues. Cette méthode, utilisée dans un premier temps pour certains enregistrements d’Herbert von Karajan, vient d’être mis en œuvre pour Maria Callas, ce qui nous vaut un superbe coffret agréablement présenté, accompagné d’un livre parfaitement illustré, l’ensemble étant proposé à 199 Euros. Dans le même temps, le site Internet spécialisé Qobuz donne la possibilité de télécharger ces enregistrements « rajeunis » en très haute résolution, c’est-à-dire en 24 bits / 96000 Herz alors que la résolution des CD habituels est de 16 bit / 44100 Herz. Comme le dit la publicité, on peut ainsi redécouvrir la voie de la célèbre cantatrice « comme on ne l’a jamais entendue ». Qu’en est-il dans la réalité ?

Nous remarquons d’abord que le nouveau coffret de CD est obligatoirement gravé à la norme de 16 bits / 44100 Herz, quelle que soit la source utilisée. On peut donc supposer que le gain de qualité ici obtenu n’est que partiel. Pour notre part, nous nous sommes livrés à des comparaisons en utilisant trois enregistrements empruntés à notre collection traditionnelle ainsi que trois téléchargements en haute définition, le tout diffusé sur une chaîne de qualité. Nous avons ainsi puisé dans les enregistrements de Turandot de Puccini, effectué à Milan, en monophonie en 1957, de Carmen réalisé à Paris, en stéréophonie, en juillet 1964 et de la seconde intégrale de La Tosca, gravée dans les mêmes conditions, toujours à Paris, à la fin de la même année.

Une écoute attentive des deux éditions de Turandot laisse apparaître un peu plus de clarté sur la voix de la cantatrice mais le tissu orchestral reste assez compact et confus malgré le savoir-faire de l’ingénieur du son, Robert Beckett. Dans La Tosca et plus encore dans Carmen, on est agréablement surpris par la transparence de l’orchestre, spectaculaire par rapport aux éditions précédentes : les voix des chanteurs, et en particulier celle de notre héroïne, gagnent très nettement en présence. A titre personnel, nous avons eu l’impression de redécouvrir cette Carmen, aujourd’hui si injustement décriée à cause de l’état vocal de Maria Callas dans les derniers mois de sa carrière. Entourée de partenaires exemplaires, Nicolaï Gedda, Andréas Guiot, Robert Massart, dirigée de main de maître par le jeune Georges Prêtre avec un Orchestre de l’Opéra flamboyant, captée idéalement par l’ingénieur du son français Paul Vavasseur, cette Carmen « callasienne » n’a jamais aussi bien sonné.

Au terme de cet exercice partiel d’écoutes comparées, il semblerait donc que, par-delà les slogans publicitaires, cette remasterisation sert essentiellement les gravures stéréophoniques des dernières années, les éditions précédentes n’étant pas pour autant déshonorantes. La « Divina », telle que nous ne l’aurions jamais entendue ? Peut-être, chacun jugera.

Jean-Pierre Pister

Le dernier enregistrement d’Orfeo 55

Après un détour par la Deutsche Grammophon avec Vivaldi puis Bach, Nathalie Stuzmann et son ensemble Orfeo 55 se retrouvent, avec ce nouveau CD consacré à Haendel, chez Erato, ce label récemment relancé par la Warner et pour lequel la cantatrice avait, naguère, gravé Amadigi di Gaula sous la direction de Marc Minkovski. L’affinité de la cantatrice - chef d’orchestre pour le compositeur « saxon » n’est plus à démontrer et nous avons tous gardé un fort souvenir de ce Messie donné par les mêmes artistes à l’Arsenal de Metz, le 12 décembre dernier, où tout était parfait, chœurs, solistes et instrumentistes avec une direction engagée, sans aucune lourdeur… et sans les excès de certains baroqueux. Nous n’avons pas, non plus, oublié, ce concert donné en l’Eglise Notre-Dame de Metz, en décembre 1988, par ce qui était, à l’époque, l’Orchestre Philharmonique de Lorraine, au cours duquel Nathalie chantait la partie de contralto de ce même Messie, sous la baguette de Jacques Houtmann. Enfin, parmi ses nombreux disques, celui gravé chez RCA avec le Hannover Band dirigé par Roy Goodman et qui comporte quelques-uns des plus beaux airs d’opéras du répertoire haendélien est à marquer d’une pierre blanche. nathalie stutzmann philippe jaroussky orfeo 55 geo

Les deux premiers CD réalisés par Orfeo 55 sortaient déjà des sentiers battus, notamment, celui consacré à Jean-Sébastien Bach, avec le concept de « cantate imaginaire ». Nathalie Stutzmann va encore plus loin, cette fois-ci, avec les Heroes from the Shadows ou « Héros de l’ombre ». De quoi s‘agit-il ? Laissons la cantatrice nous l’expliquer dans le remarquable texte d’accompagnement : « L’idée de ce programme me taraudait depuis longtemps... En fait, depuis la première fois où j’ai chanté  le rôle-titre d’Amadigi. J’étais dans la lumière avec ces grands airs héroïques du personnage, et pourtant je m’extasiais devant la beauté de l’air du second rôle, Dardano, qui chantait « Pena tiranna » et me semblait bien plus intéressant et expressif que la plupart des airs qui m’étaient dévolus ! […] je rêvais de pouvoir, ne serait-ce que le temps d’un récital, me plonger avec délice dans les ombres des ouvrages et mettre en lumière ce répertoire de deuxième voire même troisième « plan », comme on dit à l’opéra, et dont le public ne se souvient pas en sortant de la salle, mais qui pourtant l’a bouleversé pendant quelques minutes de parenthèse lors du spectacle. Un peu comme ces acteurs extraordinaires qui jalonnent le cinéma, dont on connaît la voix, le visage, mais dont on peine toujours à retrouver le nom ».

Nathalie Stutzmann a donc entrepris de relire une quarantaine de partitions qui constituent l’ensemble de ce que Haendel a écrit pour l’opéra. Elle a sélectionné quatorze airs dévolus à des personnages réputés secondaires et aux profils psychologiques variés, tant dans des œuvres aussi connues qu’Ariodante, Serse, Giulio Cesare, Rodelinda, Tamerlani  que dans des partitions plus rares comme Silla ou Partenope. A ce florilège s’ajoutent cinq ouvertures ou Sinfonie empruntées à Poro, Orlando, Partenope, Scipione, Serse qui mettent particulièrement bien en valeur les qualités instrumentales d’Orfeo 55. Une dernière précision : à la plage 14, dans la scène 11 du premier acte de Giulio Cesare, Nathalie Stutzmann, Cornelia, donne la réplique à Philippe Jaroussky, Sesto. Une rencontre au sommet !

Un tel enregistrement constitue un double événement musicologique et artistique qui fut, très justement, distingué par un Diapason d’Or en décembre 2014. La cantatrice s’y couvre de gloire, aussi bien comme soliste qu’en dirigeant ses vingt-deux amis qui constituent l’ensemble Orfeo 55. Il faut insister également sur l’excellence de la réalisation technique. Les prises de son, réalisées en mai 2014, dans l’Eglise du Bon Secours à Paris, sont d’une clarté et d’une finesse rares. Nous possédons personnellement cette réalisation sous deux supports différents : d’une part en CD traditionnel ; d’autre part en fichier informatique téléchargé sur le site spécialisé Qobuz, en « Haute Définition 24 bits 96000 Hz ». Dans les deux cas, le rendu sonore est un régal pour tout audiophile, avec une légère plus-value pour la seconde édition. Nous avons beaucoup aimé Vivaldi-Prima Donna et Bach-Une Cantate imaginaire. Nous avons adoré ces Heroes from the Shadows. Merci à vous, Madame. Merci à vos musiciens. Et à très bientôt à l’Arsenal.

Jean-Pierre Pister, vice-président du Cercle Lyrique de Metz

L’Orchestre National de Lorraine justement honoré

 

D’année en année, l’Orchestre National de Loraine et son directeur musical, Jacques Mercier, nous gratifient de moments de musique exceptionnels, aussi bien sur le plateau de l’Arsenal que dans la fosse de l’Opéra-Théâtre. Comment oublier, en effet, depuis plus d’une décennie, ces Sibelius, Janáček, Chostakovitch, ce Nevski de Prokofiev, cette Vida breve de Manuel de Falla en concert en 2004 et sur scène en 2014, ce Requiem de Verdi en juin dernier…pour ne citer que quelques événements particulièrement marquant ? La discographie de l’orchestre nous entraine vers des sommets comparables. Plutôt que d’enregistrer la énième version des Symphonies de Brahms ou du Premier Concerto de Tchaïkovski, Jacques Mercier et ses musiciens ont fait le choix de graver des œuvres inédites du répertoire français, avec le soutien de l’excellent label Timpani et, plus récemment, du Palazzetto Bru Zane, cet institut vénitien qui s’est donné pour mission de promouvoir la musique romantique française. A cet égard, l’année 2014 est à marquer d’une pierre blanche avec deux publications particulièrement distinguées par la critique et consacrées, respectivement à Théodore Gouvy et à Florent Schmitt. cd gouvy

Que Théodore Gouvy, compositeur franco-allemand né à Hombourg-Haut en 1819, soit familier de l’orchestre et de son chef n’est pas pour nous surprendre. On se souvient du succès remporté, il y a plus de vingt ans, par l’enregistrement de son Requiem, Jacques Houtmann dirigeant alors le « Philharmonique de Lorraine ». Quant à ses Six Symphonies, elles ont fait l’objet d’une intégrale gravée par le label allemand CPO sous la direction de Jacques Mercier, lui-même, à la tête de l'Orchestre Deutsche Radio Philharmonie de Sarrebrück-Kaiszerslautern. Dans un superbe livre-disque particulièrement bien documenté, le Palazzetto Bru Zane nous propose un panel d’œuvres diverses du  compositeur mosellan par différents interprètes. L’ONL et son chef nous livrent dans cet ensemble  trois Ouvertures de concert gravées dans la grande salle de l’Arsenal en juillet 2013 : Le Ciaour, d’après Byron, Jeanne d’Arc, d’après Schiller et Le Festival. On aura une juste idée de cette excellente contribution avec Jeanne d’Arc.

Théodor Gouvy, Jeanne d’Arc, Ouverture

Quant à Florent Schmitt, autre compositeur lorrain né à Blamont en 1878 et décédé à Neuilly en 1958, il estt une des priorités de Jacques Mercier depuis ces années passées à la tête de l’Orchestre National d’Ile de France et ses premiers enregistrements pour RCA. Florent Schmitt est un compositeur injustement oublié et nous ne reviendrons pas sur une récente et injuste mise en cause de son attitude sous l’occupation débouchant sur le retrait de son patronyme dans un collège de Saint-Germain-en-Laye. Contemporain de Debussy et, surtout, de Ravel,  le compositeur a su, à la fois, assumer l’héritage de l’impressionnisme français et le flamboiement orchestral de l’école russe si bien illustré par Rimski-Korsakov.

Mis en valeur par les excellentes prises de son des ingénieurs de Timpani -et par l’acoustique de l’Arsenal, toujours en juillet 2013- les musiciens de l’ONL et leur chef se couvrent de gloire en nous faisant découvrir Le Petit Elfe ferme-l’œil, ballet inspiré par un conte d’Andersen et créé à l’Opéra-comique en 1924 sous la direction d’Albert Wolf. Ce superbe CD est complété par Introït, Récit et Congé, pièce concertante pour violoncelle et orchestre avec Henri Demarquette comme soliste. Cet enregistrement est d’un niveau exceptionnel, au double plan artistique et technique, que ce soit sur le support traditionnel du CD ou en Haute Définition par téléchargement sur les plateformes spécialisées. On comprend qu’il ait été primé, simultanément par  un Choc de l’année de la revue Classica aussi bien que par un Diapason d’Or de l’année : ces deux distinctions ont été solennellement attribuées lors de cérémonies organisées à Radio-France et à la salle Pleyel, les 24 novembre et 2 décembre 2014.

Ce CD succède, sous le même label, à un précédent Florent Schmitt qui comprenait, notamment, Antoine et Cléopâtre ; et à un Gabriel Pierné, avec la révélation de L’An Mil. Des gravures déjà récompensées par un Diaapson d’or ! Souhaitons longue vie à cette collaboration exemplaire qui associe l'Orchestre National de Lorraine et Timpani.  Avec nos voeux et nos encouragements au seuil de cette nouvelel année 2015, exprimons notre pleine reconnaissance à tous les membres de l’Orchestre et leur Directeur musical.

Jean-Pierre Pister